EMILIE

Cette soirée avait été particulièrement tendue, en même temps les nominations n'étaient jamais simples et je me doutais que ça n'était que le début et que les prochaines risquaient d'être encore plus compliquées. Cela faisait bien une petite heure que tout le monde était reparti vaquer à leurs occupations, et moi, à peine j'avais terminé de manger que je m'étais décidé à faire un tour dehors, mes pas me guidant rapidement vers la piscine où je repérais Emilie assise sur le bord. Je relevais donc légèrement mon short pour prendre place à côté d'elle, mes pieds trempant dans l'eau. « C'est bon, la crise est passée ? » Autant pour elle que pour les autres, parce que les décibels étaient rapidement devenus incontrôlable là dedans.

Il est vrai que la situation était devenue hors de contrôle assez rapidement mais très franchement, je ne me sentais pas bien concerné par aucun des points de vu, probablement parce que je n'y avais jusqu'ici pas prêté la moindre attention. Elle me disait que les autres avaient raison et que c'était de sa faute, et surtout, que je n'étais pas obligé de rester ici, que je m'amuserais probablement plus avec quelqu'un d'autre. « Ok, alors ce qu'il faut que tu saches, c'est que vos histoires moi, elles me font plus rire que pleurer hein. J'en ai strictement rien à faire de qui est en tord. Ce que je vois là, c'est que toi tu te mets en retrait, et fais pile ce que tous les autres ont l'air de te reprocher. Tu vas peut-être me trouver dur hein, j'dis pas mais bon dieu bouge toi, sérieusement ? Qu'est ce que ça t'apporte de t'apitoyer sur ton sort ? Il te reste au minimum deux jours, profite, quitte à crier sur un ou deux imbéciles si ça te chante, mais larmoyer dans ton coin ne te fera franchement aucun bien. » J'étais le plus honnête possible, et lui exposais mon point de vu sans lui crier dessus, parce que ça n'était pas mon genre. Mais bon, à sa place, je serais plutôt entrain de profiter un maximum plutôt que de repeindre le gazon de mes larmes. « Les autres te reprochent de ne pas essayer assez, alors vas y, essaie, intéresse toi à eux, et ils s'intéresseront à toi en retour. Y'a pas de secret. »

J'étais d'accord pour dire que c'était toujours compliqué de faire face aux préjugés des uns et des autres, mais il ne fallait pas qu'elle abandonne à la première difficulté. Secret Story était une aventure compliquée, testant à la fois nos neurones et nos nerfs. « Voilà. Et puis Vincent ou un autre, oublie pas que t'es là pour toi. Et justement, si t'es là, c'est que de base, t'as autant ta place qu'un autre, faut juste que tu fasses en sorte de le prouver à tout le monde. N'attends pas qu'ils te laissent une chance, saisi juste l'opportunité et ils t'accepteront à leur manière. » Chacun était différent et le courant ne pouvais pas passer avec tout le monde, mais j'étais certain qu'elle était capable de se trouver quelques affinités ici. « C'est rien. En vérité j'étais même pas venu te voir, j'avais juste besoin d'un peu d'air. » Bon, ça me faisait plaisir de lui tenir compagnie, je dis pas hein, juste que ça n'était pas volontaire de ma part, et que je n'avais rien d'un chevalier blanc. « Bon alors, tant qu'on y est, qu'est ce que tu dirais de me parler un peu de toi ? » Bien oui, autant commencer tout de suite son initiation après tout.

La jeune femme semblait donc avoir pris conscience qu'il ne fallait pas qu'elle se laisse abattre de la sorte et qu'elle avait encore quelques jours pour défendre sa place au sein de l'aventure. Les candidats l'avaient nominé, c'était une chose, mais ça n'était pas nous qui avions le dernier mot. Elle me parlait un peu d'elle, me disant qu'elle était en couple avec un joueur de foot dont le nom m'échappait. Il faut dire que je n'y connaissais pas grand chose en foot. « Deux enfants ? Ah oui. Je peux me permettre une question indiscrète ? » lui demandais-je avant de la poser « Tu n'as pas peur de mettre ton couple en péril en venant ici, être attiré par un autre garçon ou quoi ? Je ne remets pas ton engagement vers ton copain non, c'est juste que je me demande comment ça se passe lorsque l'on est en couple dans un jeu comme celui ci. » Parce que ça devait être une aventure tout à fait différente de celle que les célibataires vivaient. « Ah et je suis coiffeur aussi, donc ne t'en fais pas, je suis paré niveau coiffure. » repris-je en riant quelque peu.

La jeune femme était donc coiffeuse comme moi, ce qui me fit sourire alors que j'approuvais ses paroles d'un hochement de tête. « En effet oui. J'ai mon petit salon sur Paris, rien de bien conséquent, mais c'est sympa. » J'aimais bien travailler là bas, j'avais l'impression d'être chez moi puisque j'avais fait ma petite déco, et que tous les produits étaient les miens. Et puis mes clients me restaient fidèles, c'était le principal. Elle me disait ensuite qu'elle ne pensait pas craquer car personne n'allait s'intéresser à elle. « Certes oui, mais enfin, tu peux toujours avoir un coup de coeur pour un gars sans que tu le veuilles, ou que ça soit réciproque, ça arrive. Enfin, personnellement, je crois qu'à ta place c'est ce qui me ferait le plus peur. » Nous vivions tous ensemble, vingt quatre heures sur vingt quatre alors ça restait assez dangereux pour les personnes qui avaient un partenaire à l'extérieur. « Mais je te souhaite de résister à la tentation, franchement, si t'y arrives, t'es une vraie battante. »

J'étais content de voir que la conversation se passait plutôt bien, chassant ainsi la moindre appréhension que j'avais pu avoir. Il était normal que pour tout le monde, ça soit toujours un peu compliqué d'aller vers les autres puisque nous étions tous des inconnus. Alors des affinités se faisaient un peu par hasard au début, et certains pouvaient se sentir léser sans réelle raison. C'était juste un concours de circonstances. Elle me disait qu'elle ne succomberait pas pour un autre garçon puisqu'elle aimait son copain, et j'approuvais d'un hochement de tête. Elle devait penser à lui pas mal, c'est sûr, mais ça n'avait rien à voir avec l'attraction physique, et le fait d'avoir quelqu'un à une certaine distance pendant un certain temps pouvait nous faire réagir différemment de ce que l'on pensait. Lorsqu'elle me disait que la personne qui se rapprochait le plus de ses critères était moi, un léger rire s'échappa de mes lèvres. « Oh, t'exagères, ils ont quand même fait un plutôt bon casting cette année. » Tous les garçons étaient plutôt pas mal, même moi je le pensais alors que je n'étais pas franchement de ce bord là. Il fallait vraiment être compliqué ou de mauvaise foi pour ne pas s'en rendre compte. « Mais c'est sympa. » Je me savais plutôt pas mal, évidemment, mais ça n'était pas quelque chose dont j'aimais me vanter, du moins, pas sérieusement. « En tout cas, ton mec doit te regarder tous les jours, alors vaut mieux pas qu'un autre gars vienne trop t'approcher, haha. Il risquerait de lui sauter dessus à sa sortie. » Enfin, à la place du copain d'Emilie, c'est ce que je ferais, si ma copine était convoitée de trop près par quelqu'un.

Elle me disait que physiquement je me rapprochais plus de son genre de garçon, mais qu'elle ne me sauterait pas pour autant dessus, ce qui me fit rire. De toute façon je n'étais pas particulièrement gêné ou quoi, chacun avait ses préférences, je prenais ça plutôt comme un compliment. « Y'a pas de soucis, t'en fais pas. » Ensuite, elle me disait que d'après elle, il y avait peu de chance qu'elle soit sauvée Vendredi. Personnellement je ne me prêtais pas aux jugements hâtifs car on pouvait toujours être surpris au final. J'attendais vraiment de voir l'avis du public, car jusqu'ici il était plutôt impossible de prédire qui était le plus en danger. Enfin, hormis Stephanie, mais elle, elle était dehors depuis plus ou moins une semaine déjà. Pour ce qui était de faire la fête en l'honneur des nominés. « Je pense qu'il faudrait que tu ailles demander à La Voix, elle organisera probablement un petit truc, ou la prod' s'en chargera. » Parce que moi je n'avais pas trop d'influence là dessus.

Elle me demandait ainsi ce que j'aimais faire dans la vie en dehors de mon métier. Passant une main dans ma barbe, je réfléchissais un court instant. « J'aime bien le breakdance, j'en fais depuis pas mal de temps maintenant. » Oui, c'était réellement bien pour se dépenser, et puis j'adorais ressentir la musique dans mon corps, suivre le rythme de celle ci. « Sinon j'aime bien le street art, la mode aussi, enfin je suis un garçon assez ouvert en général, j'aime bien toucher à tout. » Il est vrai que j'aimais tester un peu tout pour découvrir de nouvelles choses. « Et toi alors, hormis ta famille et ton métier, qu'est ce que tu dirais qui te caractérise ? » Nous avions tous différentes choses qui faisaient que nous étions qui nous étions, j'étais ainsi curieux de savoir comment la jeune femme se percevait.

Emilie était donc une fille qui aimait plaisanter, c'était dommage qu'elle ne l'ait pas montré jusqu'ici, les gens en seraient peut-être venus à l'apprécier plus tôt, car j'étais certain qu'elle allait réussir à rentrer dans le coeur de chacun durant les prochains jours. Il fallait juste espérer pour elle que ça ne serait pas trop tard. « Une blagueuse donc, j'aime, y'en a pas assez par ici. » C'est vrai que c'était plutôt calme jusqu'ici dans le jeu, hormis les petits accrochages à droite et à gauche. Moi même, j'aimais bien tendre des pièges et faire de mauvaises blagues, mais c'était toujours compliqué au début lorsque l'on ne connaissait pas les gens. « Je peux te demander les raisons qui ont fait que tu étais si introvertie en début de jeu ? » Elle avait peut-être eu un soucis ou quoi, allez savoir.

Elle me disait donc qu'il s'était passé quelque chose dans sa famille et que de ce fait, elle n'avait pas pu pleinement profiter de ce début d'aventure comme elle l'aurait souhaité. Je comprenais où elle voulait en venir, c'était toujours compliqué de profiter d'un jeu comme celui ci lorsque l'on avait pas de nouvelles de l'extérieur alors que quelque chose s'était produit. Et alors qu'elle m'expliquait tout ça, voilà qu'elle se mettait à trébucher de sa chaise si bien que je me mis à rire, cassant tout le côté dramatique de la situation. Emilie me disait que c'était tout elle avant de continuer sur le fait qu'elle espérait pouvoir montrer ce qu'elle vaut. « Oui enfin, faut-il encore que tu restes en vie jusque là. » m'amusais-je, parce que parti comme c'était, si elle trébuchait sur une chaise, qu'est ce que ça serait dans les prochains jours, haha. « T'inquiètes, de toute façon c'est au public que tu dois plaire, t'as juste à être toi-même à partir de maintenant... et tenter de ne pas trop te faire mal aussi. »